Exposition 2018 :
Le Livre surréaliste au féminin : faire œuvre à deux

Exposition ayant eu lieu à la Bibliothèque des lettres et sciences humaines de l’Université de Montréal, du 11 avril au 4 mai 2018

Le Livre surréaliste n’a presque jamais un seul auteur : fruit d’une démarche collaborative qui crée un nouveau rapport entre texte et image, il appelle une autre manière de lire qui prenne en compte cette réalité double. Si le travail collaboratif entre un auteur et un artiste ayant abouti aux grands classiques du Livre surréaliste (pensons à Nadja de Breton et J.-A. Boiffard, à Facile d’Éluard et Man Ray ou à Parler seul de Tzara et Miró) a suscité de nombreuses études critiques, il n’en est pas de même des ouvrages créés par deux femmes ou par une femme et un homme. Les exemples de collaborations « féminines », « mixtes » ou de dualité créatrice (c’est le cas d’une auteure se dédoublant en artiste visuelle, ou vice versa) sont pourtant nombreux, où les femmes outrepassent les traditionnelles pratiques de l’illustration, de la reliure ou du scrapbooking.

Aveux non avenus (1930), La Maison de la peur (1938), La Dame ovale (1939), Le Journal de Frida Kahlo (1944-54), Dons des féminines (1951), Le Poids d’un oiseau (1955), Sur le champ (1967), Oh ! Violette ou la Politesse des végétaux (1969), Brelin le frou ou le Portrait de famille (1975) et Le Livre de Leonor Fini (1975) : telles sont les œuvres qui font l’objet de l’exposition préparée tout au long du trimestre d’hiver 2018 par les étudiantes du séminaire « Écrits des femmes : XIXe-XXIe siècles », sous la direction d’Andrea Oberhuber. S’appuyant sur la notion de partage, comme leurs auteures et les artistes visuels avant elles, Sarah-Jeanne Beauchamp Houde, Anne Borgella, Florence Dubois, Marie Joëlle Essex, Jeanne Hourez, Beth Kearney, Henriette Yaa Koko, Béatrice Lefebvre-Côté, Marianne Martin, Marie Meuleman, Julie-Michèle Morin, Alexe Pilon, Clélia Pulido, Valérie Savard, Sandrine Sibuet et Ludmilla Vekhoff ont œuvré à mettre en lumière la diversité des livres en ce qui concerne leur conception, leur matérialité et le dispositif texte/image.

Présentée dans l’Atrium de la Bibliothèque des lettres et sciences humaines de l’Université de Montréal, l’exposition a pour but de faire connaître une sélection représentative d’un corpus bien plus vaste, composé d’une quarantaine de livres dits surréalistes. Qu’elles aient été publiées dans l’entre-deux-guerres ou dans les années 1970, les œuvres présentées relèvent, de près ou de loin, de l’esthétique du Surréalisme, et font la part belle à ses valeurs : le merveilleux, l’instinct et la folie, l’enfance et le jeu, le désir et l’érotisme, la révolte et la subversion des normes établies, le rêve et l’écriture à quatre mains.

Le Livre surréaliste au féminin apparaît ainsi comme un espace de rencontre entre deux forces créatrices mues par le désir d’expérimenter de nouvelles formes, au-delà de la tradition du livre illustré où l’image n’est souvent qu’une paraphrase du texte. La rencontre avec l’autre créateur, avec l’autre en soi, soulève une série de questions : comment s’effectue le partage de la double page ? De quelle manière peut-on imposer sa voix, sa vision tout en respectant le terrain de l’autre, en prenant garde peut-être à des limites qui ne devraient pas être transgressées ? Quelle posture devrait adopter le lecteur ou la lectrice en ouvrant ces objets où se croisent, selon différentes modalités, l’écriture et l’image (peinture, photographie, dessin, collage) ?

Andrea Oberhuber
Compétences

Posté le

août 7, 2018